A BOYCOTTER.
Écrire de haïkus, Patrick Gillet
éd. Écrire aujourd'hui, 2015
Pour résumer ce livre, trois mots me viennent à l'esprit : négligence, plagiat et piratage.
Négligence. Les citations sont orphelines des références bibliographiques.
Plagiat. En lisant les propos de P. Gillet, une phrase m'est revenue à l'esprit : Les périodes agitées de la seconde guerre mondiale et de la reconstruction qui s'en est suivie furent peu propices aux publications de haïku. Elle est parue dans mon essai Tout sur les haïkus.
Sous la plume de P. Gillet, elle devient, sans guillemets d'usage : La seconde guerre mondiale puis la reconstruction ne furent guère propices au haïku.
Ce n'est qu'une phrase. Mais une phrase suffit à laisser planer le doute, d'autant que l'auteur récidive. Déjà dans un article sur Paul-Louis Couchoud paru dans la revue Gong, j'ai retrouvé une phrase recopiée de mon livre avec juste un ou deux mots changés. Combien de phrases a-t-il ainsi accolées pour rédiger son ouvrage? Il faudrait un temps précieux pour le vérifier et le quantifier.
Piratage.
Abstraction faite d'une trentaine de pages de biographies, le livre se divise en deux parties : une importante anthologie d'environ 600 haïkus classés par thèmes et des textes expliquant succinctement l'histoire et l'art du haïku. Plus d'un tiers de l'anthologie est composée de traductions de haïkus japonais ou anglophones. Pour chacune d'elles les références bibliographiques de rigueur ne sont pas précisées. Par ce tour de passe-passe, P. Gillet s'approprie les traductions comme si elles étaient de sa plume. Comble de l'ironie, son éditeur ose prétendre que « toute reproduction, même partielle, est interdite ! »
Au vu du volume (près de 250 haïkus traduits) on ne peut plus parler d'emprunt. Il s'agit bien de piratage.
Du jamais vu !
Jugez par vous-même1 :
Pour une vingtaine de haïkus de Richard Wright, les traductions, signées de Patrick Blanche, sont parues aux éditions de La Table Ronde : Cet autre monde.
Corinne Atlan est dépouillée d’une quinzaine de haïkus parus en trois volumes aux éditions Gallimard (Anthologie du poème court japonais, Le poème court japonais d'aujourd'hui) et Picquier (Haïkus du temps présent de Madoka Mayuzumi).
Une quarantaine de traductions de Makoto Kemmoku proviennent de deux ouvrages parus aux éditions de La Table Ronde (Du rouge aux lèvres et Bashō, seigner ermite).
Une vingtaine de haïkus de Jack Kerouac, traduits par Bertrand Agostini, sont extraits de l'intégrale (Le livre des haïkus) parue aux éditions de La Table Ronde
Sur les 26 haïkus de Shiki, 18 ont été traduits par Joan Titus-Carmel et rassemblés par les éditions Verdier sous le titre Shiki, 107 haïkus. 18 sur 107, soit 1/6ème de l’ouvrage piraté en toute impunité !
Signalons enfin, que M. Gillet a reproduit, dans les pages intérieures, une œuvre de l'artiste Manda sans son autorisation et sans mentionner son nom.
Un travail inqualifiable qui ne mérite que le pilon. Qu’on se le dise !
1Ces données ne sont que partielles car je n'ai analysé qu'un tiers des traductions. Je n'ai pas cherché de quels livres pouvaient provenir les haïkus de Buson, Issa, Ryôkan, Sôseki, Santoka, et bien d'autres. Cela nécessite un temps considérable et je ne juge plus très utilie d'entreprendre ce travail. Preuve est faite de la malhonnêteté de cet auteur.
© Dominique Chipot : www.dominiquechipot.fr / Le haïku, le temps d’un instant