La simplicité
"Lorsqu'on est témoin d'une scène ou d'un événement que l'on estime intéressant de traduire en mots,
si l'on veut que le lecteur ressente le même intérêt, il importe de ne recourir à aucune ornementation
verbale, à aucune exagération, mais de simplement décrire la chose telle qu'on la voit"
Shiki (1866-1902)
Dire des choses simples avec des mots simples dans un style simple.
Ainsi se résume le haïku.
Il ne doit donc pas y avoir de mots superflus ou inutiles, d'
emphases ou de métaphores;
Il ne faut employer que peu d'adverbes, d'adjectifs,
d'articles, de pronoms personnels ou de verbes; Les jeux de mots sont possibles, sans toutefois
en abuser, et les rimes également.
Il faut être précis dans la concision, aller droit au but.
Le haïku doit être intuitif, à l'état brut, sans artifice intellectuel qui en compliquerait la
compréhension.
La Voie Lactée
Appuyée d'un côté
Sur la montagne.
Shiki
La métrique
Ce n'est pas un hasard si la forme courte en poésie, si efficace, si disponible, si opérationnelle tout
de suite, prend aujourd'hui dans le monde une telle ampleur ... parce que nous vivons dans l'urgence et
la dispersion, dans une civilisation planétaire où s'épanouissent le flash, le spot, le clip, l'instantané,
le momentané et le provisoire.
Alain Kervern in 'Haïku sans frontières'
Le haïku traditionnel est composé de 17 syllabes réparties en 3 lignes de 5, 7 puis 5 syllabes.
Cette composition est 'dictée' par la langue japonaise (élocution, métrique, absence d'articles, ...)
Transposer cette règle en d'autres langues n'est pas toujours aisé, aussi existe-t-il
plusieurs conseils dans la
communauté haïku.
Dans un caniveau
Court par dessus le verglas
L'eau de cuisson du riz.
Issa
La brièveté
Cette poésie si simple, si transparente, que les mots à peine dits s'évaporent et ne laissent sur les
lèvres que le sel de la vérité, et dans le coeur, parfois, la nostalgie de l'absolu.
Henri Brunel
Ce qui importe n'est pas tant le nombre de syllabes ou la composition court-long-court, mais le fait
que le haïku
puisse être lu à haute voix en un seul souffle.
J'ai beau les secouer
Mes manches restent
Couvertes de neige.
Sôseki
Le haïku doit se suffire à lui-même.
Il ne doit pas être accompagné de longs commentaires ou descriptifs qui faciliteraient sa compréhension.
L'image
Le poète est peintre, mais un peintre qui sur sa palette disposerait, outre des couleurs, de sons,
d'odeurs et de saveurs philosophiques.
Hervé Collet
Là encore tout n'est pas figé, et il existe
plusieurs possibilités
à 1, 2 ou 3 images ...
sauf pour le
haïku traditionnel.
Deux images est ce qu'il y a de plus fréquent :
La première situe le haïku dans le temps et l'espace, décrit un bref instant; La deuxième, et toute la force du haïku est là,
montre un élément inattendu, insolite, étonnant, qui surprendra le lecteur.
Je marche sur le gazon
Comme si je foulais
Les nuages.
Bôsha
(à ne pas confondre avec Bashô)
La césure
Composer des haïkus c'est peut-être, sans rien connaître de la culture japonaise, utiliser une formule
minimale, courte, concentrée à l'extrème, aiguisée, acérée, pour mieux perforer la surface de la réalité,
à la manière d'un rayon laser, ou d'une loupe qui concentre en un point prècis la chaleur solaire pour
mieux la percer, et passer de l'autre côté du monde.
Alain Kervern in 'Haïku sans frontières'
Les deux images sont séparées d'une césure, ou d'un mot-pivot,
pour éviter que le haïku ne soit qu'une seule et
même phrase.
Cette césure, dite
kireji, en référence au japonais qui dispose de mots spéciaux pour la matérialiser,
doit intervenir en fin de première ou deuxième ligne (pas aux 2).
En français, elle peut être soit un signe de ponctuation situé en fin de ligne (si le haïkiste décide d'utiliser
la ponctuation, ce qui n'est pas toujours le cas), soit un mot situé au milieu d'un vers (en général le deuxième),
soit une coupure (non matérialisée) que le lecteur marquera naturellement (surtout à haute voix).
Cette césure permet également de dissocier les différentes images.
Lune du soir
Il s'est mis torse nu
L'escargot.
Issa
La saison
L'originalité du poète d'un haïku réside dans la plupart des cas en douze syllabes. En effet le haïku comporte,
en règle générale, une partie indiquant la saison. C'est dans les 12 syllabes restantes que le poète peut
se montrer génial. Et ce serait commentable?
Maurice Coyaud in 'Le triangle magique'
La haïku traditionnel oblige de situer le moment
décrit dans le cours de l'année.
C'est une manière de reconnaître la place toute relative de l'homme dans l'univers.
Pour cela, l'auteur cite directement la
saison, ou la suggère, ou utilise un mot (un
kigo)
qui précise la période de l'année, ou un moment de la journée.
C'est tellement indispensable qu'il existe des
recueils énumérant ces mots de saison en les agrémentant,
ou non, d'exemples.
Pas un endroit
Où se mettre
Quelle chaleur.
Bokuya
© 2002 -
dominique Chipot - textes & photos
Le haïku : le temps d'un instant
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